jeudi 2 avril 2015

France, du risque démocratique au monolithe fasciste




Je ne sais pas si c'est bien bien clair pour tout le monde, mais justifier des méthodes jusque là ‪‎illégales‬ de ‪‎renseignement‬, sans contrôle du judiciaire‬ sur l'exécutif‬, au motif de la "‪‎prévention‬ des violences collectives de nature à porter gravement atteinte‬ à la paix‬ publique‬", cette formulation extrêmement générale et donc universelle signifie très exactement, précisément par cet aspect extrêmement général et donc universel, et quels que soient ensuite les semblants de précisions apportés par oral pour faire passer un écrit qui lui ne les contiendra pas, que l'appareil gouvernemental et de police peut s'autoriser de surveiller, sans aucune justification judiciaire, absolument n'importe qui appartenant à n'importe quel "collectif" (trois personnes, c'est un "collectif") dont on suppose ou dont on choisit de supposer que ses actions, ou ses projets d'actions, sont potentiellement de "nature" à porter "gravement atteinte" à la "paix publique".

Et donc, potentiellement, absolument n'importe qui.

Et c'est également et presque "surtout", par contrecoup immédiat ou corollaire direct, rendre potentiellement illégale, du moins suspecte, et en tout arbitraire surveillable comme telle, sans que personne doive en rendre compte devant la justice, et donc devant la loi!, toute réunion ou tout projet de réunion ayant pour visée la contestation de l'ordre tel qu'il est (ce qu'on appelle traditionnellement "l'ordre établi", mais il faut rendre aux mots leur sens : l'ordre tel qu'il s'institue dans un certain ensemble de lois, d'usages, et de moyens de peur et de force pour maintenir et faire respecter ces lois, ces usages).

En un mot comme en cent : toute insurrection devient criminelle, toute révolte devient hors-la-loi, tout projet contre le pouvoir devient un ennemi du bien, et non plus seulement un adversaire, démocratique et libre, d'un certain pouvoir.

Et en contrejour, bien sûr, on aperçoit la possibilité de décider de n'importe quelle "réunion" qu'elle est une ennemie de la paix, et d'interdire cette réunion, ce qui est, en France, aussi anticonstitutionnel qu'antirépublicain.

Pardon, mais c'est le passage d'un état de débat (de démocratie, si l'on y tient) et de risque, c'est-à-dire ouvert à devoir rendre compte devant les citoyens des résultats de sa politique‬, et à en accepter la contradiction‬, et à courir le risque que cette contradiction s'incarne dans des actions‬ violentes, qui seront éventuellement punies par la loi — ensuite! mais ensuite!, seulement si crime ou tentative de crime il y a bien eu! — à un état à caractère fasciste‬, c'est-à-dire asseyant son monolithisme sur la création de lois qui le rendent — littéralement — "in-contestable" ; et en empêchant, en amont, la "contestation" de s'exprimer par des actions "collectives" (trente millions de personnes, c'est un "collectif") à l'encontre du pouvoir, au motif, parfaitement indéterminable de manière prévisionnelle, et assez fourre-tout pour que tout y entre, que peut-être, peut-être, peut-être, une hypothétique et bien vague "paix publique", — dont l'exécutif, c'est-à-dire le président‬ de la République‬ et le gouvernement dirigé par le premier‬ ministre‬, sont à titre individuel seuls juges, sans devoir, encore une fois, en rendre compte devant une quelconque justice, le moindre appareil judiciaire, ou une quelconque balance objective et commune à toutes et à tous des lois‬ —, s'en trouverait "gravement atteinte".



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